mercredi 19 septembre 2012

Le principe de cohérence


Si quelque esprit curieux cherchait à se faire une image de l'Islam à travers les médias occidentaux contemporains, voici ce qu'il trouverait : bruits de bottes, menaces de guerre, attentats, émeutes, appels au meurtre, dictateurs fous contre foules sanguinaires, agressions en tout genre. Les infos sont saturées de séquences montrant des bandes de barbus vociférant de haine.



Bien. Arrive une actrice de série télé assez populaire en France qui déclare que l'Islam lui fait peur, qu'elle est, au sens propre, "islamophobe". Et ces mêmes médias qui viennent à l'instant de clore une séquence d'attentat, d'émeute ou de massacre dans un pays musulman (ou une banlieue française à défaut), de hurler en chœur haro sur l'histrionne inconsciente. Et voici les consommateurs de médias qui (quel culot!) s'en mêlent et crachent sur tous les forums que la dame "dit tout haut ce qu'ils pensent tout bas".

Mais à quoi, sacrebleu, vous attendiez-vous donc?

Je ne me rappelle pas avoir vu souvent ni récemment une émission montrant des musulmans normaux. Je veux dire des pères de famille conduisant leurs enfants à l'école, des femmes qui se rendent au boulot (1), des artisans à l’œuvre, des commerçants qui commercent, des cuisiniers qui cuisinent, des comptables qui comptent, des employés qui travaillent. Je ne me rappelle pas - ou très rarement - avoir vu de reportage sur des artistes, écrivains, poètes, peintres, musiciens, danseurs, chanteurs, architectes maghrébins ou orientaux. Ni sur des scientifiques musulmans, médecins, mathématiciens, géographes, biologistes, physiciens, chimistes (2). Je ne me rappelle pas avoir entendu beaucoup parler à la télé de l'histoire arabe ou maghrébine, des grandes figures du passé, d'Avicenne ou d'Al-Battani, de Geber, d'Ibn Battuta ou d'Al Idrissi, d'Ibn Khaldoun ou d'Al Massoudi. D'Avempace, d'Omar Khayyam ou d'Ibn Zeydoun ou même d'Al Khansa. Pas de documentaire sur les miniatures persanes, les aciers de Damas, les brocarts de Syrie. (3)


Non. Pléthore de barbus hystériques sur toutes les chaines, à toutes les heures. De la guerre, de la haine, du sang et des larmes. Des émeutes de banlieue, de la délinquance, et toujours une pincée de crétins en djellaba qui braillent "mort aux chiens d'infidèles!" dès qu'une caméra les regarde. Lorsqu'on présente un "philosophe" musulman, c'est généralement pour montrer comme il prône la charia et la lapidation. Pas un mot sur Al-Kindi ni Al-Farabi, ni surtout - oh surtout pas - sur Mohamed Iqbal. Même les djeunz de banlieue ne connaissent rien de leur Histoire, de la culture de leurs ancêtres, d'où ils viennent : on ne leur donne que de la barbe et des slogans haineux. C'est bien d'effrayer les gens avec des séquences-chocs, ça fait de l'audience, c'est bon pour l'audimat, bon pour les finances des propriétaires de chaines et pour le salaire des journalistes-vedettes. Mais effrayer les gens puis s'étonner qu'ils aient peur, c'est franchement stupide. "Dérapage" couinent-ils? Qui dérape?

Donc lorsqu'une actrice, représentative du français moyen et suivie de ses net-commentateurs admiratifs déclare que ce qu'elle voit lui fait peur, tiens donc, la presse vertueuse et bien pensante, la même toujours, de lui jeter des cailloux en s'étonnant, main sur le cœur et bouche en cul de poule : "Mais d'où vient tant de haine?"

D'où? Sans blague? J'en ai bien une petite idée ....

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(1) Hé oui. Vous les imaginiez toutes cloitrées, terrorisées, à la maison?
(2) Pardon. Oublions les chimistes. Car les chimistes musulmans, contrairement aux nôtres qui bossent honnêtement pour l'une ou l'autre multinationale pharmaceutique, à mettre au point des médicaments anti-obésité à l'efficacité relative et aux effets secondaires potentiellement mortels, - non, les les chimistes musulmans travaillent forcément tous en Iran à mettre au point des armes de destruction massive. C'est clair et beau comme un James Bond ou un Fu Manchu.
(3) Ou alors rarement, sur Arte, à l'heure où les gens dorment, où les noctambules dansent et où les insomniaques tchattent.